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Jeremy avait regretté de ne pas avoir eu l'opportunité de jouer Hamlet précédemment sous la direction de Tyrone Guthrie en 1959. Enfin en 1961 le rôle s'offrit à lui au Oxford Playhouse, aux cotés de Helen Cherry, Robert Eddison et Joseph O'Connor. La production fut ensuite transférée au Strand Theatre à Londres pour quatre semaines d'un énorme succès.
 
Le metteur en scène Frank Hauser avait revisité la pièce et opté pour un décor très minimaliste et épuré.
 
"Le texte a été entièrement réétudié et a été rendu dans le bon sens par chaque artiste. Mais en tant qu'acteur, l'interprétation de Jeremy Brett était remarquable en elle même. Ici, chacun était en noir ou brun grisâtre, et cela prouvait que la prestance de Jeremy Brett dans le rôle du Prince du Danemark n'avait pas besoin d'être soulignée par l'habituel manteau de zibeline. Il était de toute évidence un prince parmi les acteurs. Sa voix était agréable et souple, et ne semblait pas se fatiguer depuis la surprise naturelle et inquiète aux informations de l'apparition, jusqu'au moment où se révèle la malheureuse tricherie de Laertes.  Il avait quelque chose de plus grand que les autres, il était princier en beauté, gestes, paroles et autorité, et il passait aisément d'une humeur à une autre…" - (H.G.M  Theatre World).
Hamlet
de William Shakespeare
- 1961 -
Oxford Playhouse / Strand Theatre, Londres
Rôle: Hamlet
La majorité des critiques firent l'éloge de la pièce et de l'interprétation de Jeremy, en considérant la production comme "juste et bienvenue" ainsi que la souffrance du héros comme "compréhensible". Pour certains, elle manquait de "profondeur et d'enthousiasme".
 
Cette représentation marqua un point crucial dans la carrière débutante de Jeremy Brett. Le rôle emblématique d'Hamlet lui apporta la notoriété et la reconnaissance de tous, et fit de lui, à 28 ans, un acteur consacré. Sa prestation au "Stand" de Londres, lui valut non seulement l’unanimité enthousiaste du public et de la critique, mais aussi la réconciliation avec son père.
 
Après la représentation le Colonel Huggins se rendit dans la loge de son fils. Il était si impressionné et admiratif, qu'il lui dit qu'il pouvait reprendre son vrai nom de famille. Son père fut anéanti, quand Jeremy, très ému, lui rétorqua qu'il était trop tard... A tous égards Hamlet resta l'un de ses rôles les plus marquants et préférés.
"Hamlet était dirigé avec toute l'approche habituelle, sûre et directe de Shakespeare de Frank Hauser et son exigence d'un parler clair et musical, pour que son et sens ne fassent plus qu'un, comme cela devrait être dans l'idéal. Le Hamlet de Jeremy Brett est arrivé comme un souffle d'air rafraîchissant après notre récente pérégrination mortelle dans le désert du Hamlet de Ian Banneh-Peter Wood, à Stratford-upon Avon."
 
"Voici un Hamlet plein de jeunesse, princier, amère, passionné dans son désir de vengeance, plein d'esprit mordant dans ses rencontres avec Polonius et , sur la scène cependant, un homme dont Ophélie aurait pu vraisemblablement se référer comme "l'attente et l'espoir d'un juste rang" – un homme qui par la voix et la prestance était un personnage royal."
 
"La façon de parler de M. Brett avait toujours une musicalité belle et expressive -- Je ne pense pas que ces dernières années, j'ai entendu le monologue "How all occasions do inform against me" dit avec un tel éventail de nuances et une telle flexibilité dans le rythme. " - (Frank Dibb, Plays and Players) -
Hamlet - texte intégral
Hamlet
Jeremy, dans une interview de Juillet 1967 du magazine "Maisons et Jardins", raconta un incident qui se produisit dans la scène du duel pendant une représentation à Londres :"Je devais désarmer Laerte en faisant sauter son épée de sa main. Cela marchait toujours bien, jusqu'à un soir où elle atterrit sur les genoux d'une jeune femme assise au premier rang d'orchestre !"
 
Hamlet et Laërte restaient statufiés sur scène et le plus grand silence régnait dans la salle... "Je m'agenouillais et essayais de scruter la salle par-dessus la rampe et très gentiment, elle me tendit l'épée, dont j'avais besoin pour poignarder Laerte. Vous auriez pu penser que le public était secoué de rire, mais il ne réagit pas, et nous-mêmes conservèrent l'ambiance tragique qu' exige la pièce, pour finir avec succès." Et le duel reprit comme si de rien n'était...  Jeremy poursuivit : "La jeune fille avait sauvé la situation et lorsque nous avons eu un rappel je lui ai envoyé un baiser !"
Dans cette même interview, Jeremy ajouta : "Je pense que je m’en suis bien tiré quoique mon seul atout ait été ma jeunesse. Je me sentais très proche d’Hamlet bien que je n’ai jamais totalement compris la scène du spectre, ce qui explique pourquoi j’aimerais tant reprendre ce rôle. Bien sûr, ce qui est frustrant dans tous ces merveilleux rôles de Shakespeare, c’est qu’il faut les jouer quand on a entre vingt et trente ans, alors que l’on est vraiment prêt à les interpréter correctement quand on en a au moins cinquante... Imaginez seulement ce que Peggy Ashcroft apporterait au rôle de Juliette, en compréhension et chaleur, si elle le jouait aujourd’hui ."
 
En fin de compte - malgré que Jeremy fut un magnifique Hamlet salué par la critique et ovationné par le public - c'est lui qui était le moins tendre à son égard. Il se reprocha son manque de compréhension du rôle et son approche superficielle à ses yeux.
 
"J'étais trop jeune, à bien des égards. J'étais trop jeune intellectuellement. J'étais trop jeune philosophiquement. J'étais Byronien. J'étais très beau, j'avais des qualités, mais j'aurais plutôt vu d'autres acteurs à ma place. Je doutais de moi."
 
C'était exagéré car en dépit de sa jeunesse, il avait l'expérience pour apporter au rôle à la fois un coup de fraîcheur et d'ardeur, mélé d'une grande intensité et profondeur.
Harold Hobson nota : "Je n'ai jamais vu un Hamlet si brutal avec Ophélie et Polonius que celui de M. Brett. Mais cela semble être la propre innovation de M. Hauser. La brutalité doit être voulue, car elle ne fait manifestement pas partie du caractère de M. Brett ou de sa présence sur scène. C'est un acteur mince et gracieux, au comportement courtois, qui traite tout le monde dans la pièce avec beaucoup d'attention, à l'exception d'Ophelia et de sa famille. Il semblerait que l'idée d'Hamlet, du mariage et de l'amour, ait été salie par sa mère et son oncle, et que, après avoir appris leur traîtrise, il ne puisse plus supporter de voir quoique ce soit qui lui rappelle des relations normales entre hommes et femmes. "
 
En réalité à cette époque, la colère d'Hamlet était inhérente à Jeremy, resté très marqué depuis la disparition de sa mère.
 
À  l'occasion de l'une de ses dernières prestations, il s'en expliqua dans le documentaire télévisé de BBC2 "Shakespeare : Playing the Dane" le 30 Octobre 1994, dans lequel différents interprètes d'Hamlet témoignent de leur expérience.
 
Jeremy raconta comment il avait canalisé dans son rôle, toute la colère qui l'habitait après la mort accidentelle de sa mère en 1959 : "Je ne pouvais pas croire aux circonstances de l’histoire… Je pensais qu’elles étaient si monstrueuses, et j’étais si brutal avec "ma mère" [dans la pièce]. Je veux dire physiquement brutal. Je pense que oui, j’étais révolté à cette époque. Ma propre mère avait été tuée sauvagement dans un accident de voiture en 1959. Et j’étais très en colère à cause de cela parce que mon fils, quand elle est morte, n’avait que trois mois. Il y avait de la colère en moi et je pense qu'elle ressortait. Je me suis senti trahi ; ma mère avait été injustement frappée. Je pense que la rage que je ressentais était perceptible."
Hamlet The Dane, Prince Danois, est la tragédie de William Shakespeare, la plus longue et l'une des plus connues. Elle a été créée en 1602 et contient le monologue le plus fameux de toute la littérature théâtrale : "To be or not to be: that is the question... "
 
Le roi du Danemark, père d'Hamlet, est mort récemment. Son frère Claudius lui a succédé en s'auto-proclamant roi et a épousé Gertrude, la veuve de son frère. Le spectre du roi apparaît alors à Hamlet et accuse Claudius de l'avoir assassiné pendant son sommeil. Le prince s'interroge: s'agit-il d'un fantôme ou bien est-il l'objet d'un démon. Il décide de venger son père en simulant la folie, mais est incapable d'agir.
 
Devant l'étrangeté de son comportement, on se demande s'il a conservé toute sa raison. Ophélie et Hamlet partagent une idylle amoureuse, mais le jeune prince l'éconduit pour accréditer sa propre folie. La mort de son père Polonius, tué par Hamlet, rend Ophélie folle. Elle se donne la mort en se noyant. Laërtes, profondément attaché à sa sœur Ophélie veut venger sa mort. Il tue Hamlet en duel. Mais Hamlet le tue finalement ignorant que son épée était empoisonnée.
Programmes HAMLET, Strand Theatre, 1961
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