La nouvelle série fut également l'occasion d'un changement majeur dans la distribution puisqu'un nouveau Watson entre en scène ! En effet, David Burke, sollicité pour jouer à Stratford, ne sut, comme tout bon acteur shakespearien, refuser une telle occasion et recommanda un comédien de ses amis dont il pensait qu'il serait parfait pour le rôle : Edward Hardwicke, le fils de Sir Cedric Hardwicke.
Le changement d'acteur est intervenu au meilleur moment dans l'évolution de la série. Marqué par la perte de son ami et l'expérience vécue, Watson a mûri. Edward Hardwicke donne calme et maturité au docteur, Plus intériorisé, il est empreint d'une sagesse et d'une bonté profondes. Plus présent pour Holmes, il prend davantage soin de son ami dont il a cerné la psyché fragile.
Les histoires abordent des thèmes plus difficiles et prennent une tonalité plus psychologique en plus de l'enquête proprement dite. Les relations entre les personnages récurrents s'approfondissent et tissent de véritables liens. Les deux personnages principaux sont plus complices et soudés qu'auparavant. L'étude de la psychologie, de la complexité des protagonistes est plus fouillée, les rendant plus vrais. On pénètre directement dans l'intimité de Holmes et de ses gestes quotidiens.
La série s'humanise et developpe de nouvelles facettes des caractères. Parfois Holmes n'hésite pas à utiliser des méthodes illégales pour une cause juste à ses yeux. Il fait sa propre justice et fait preuve de compréhension et de compassion, quand les coupables ne sont pas mauvais dans l'âme. Il est attentif aux autres, se préoccupe de leur sort et pardonne la vengeance personnelle (Capitaine Crocker, Neville St Clair, Dr Sterndale). Si le contexte d'angoisse et de mystère est plus dense, si Holmes est moins facétieux, il garde encore son sens de l'humour et sa théâtralité. Vif dans ses gestes et ses éclats de voix, il aime toujours autant surprendre Watson ou se déguiser.
Les scénarios prennent un peu de retrait par rapport à l'œuvre originale et tendent à faire passer certains messages. Une idée de Jeremy apporta un changement majeur dans L'Aventure du Pied du Diable, lorsque Holmes s'affranchit de la cocaïne. L'acteur demanda l'approbation de Dame Jean, la fille d'Arthur Conan Doyle, pour tourner la scène où le détective enfouit sa seringue dans le sable et se libére de sa dépendance. Jeremy voulait montrer à la jeune génération qu'Holmes n'avait pas besoin de drogue pour être un bon détective.
Des changements se produisirent également au niveau de la production. Pendant l'été 1985, Michael Cox passa la main à June Wyndham-Davies qui prit en charge une volée de onze nouveaux épisodes avec l'aval de Granada. June Wyndham-Davies avait déjà à son actif la production d'une autre série "victorienne" de la Granada, "Cribb", tirée de l'œuvre de Peter Lovesey. Cependant, Mochael Cox, resté producteur exécutif, reconnut dans "A study in celluloïd" que ce n'était pas l'idéal. Il déplora que la productrice, restée à Londres, perde ainsi le suivi direct des tournages à Manchester. Après la reprise des tournages à l'automne 1985, des réalisations trop coûteuses commencèrent à créer des problèmes de budget...